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LA CLASSIFICATION DES JUGEMENTS

On peut les classer de deux façons.

D’abord, on peut distinguer les jugements contradictoires des jugements par défaut, cette classification étant fondée sur la présence ou non des parties à l’instance.

On peut également les classer en distinguant, les jugements des ordonnances, classification qui tient compte de la forme, mais également des effets de la décision.

Un troisième mode de classification peut consister à distinguer d’une part, les jugements définitifs et d’autre part les jugements provisoires. Et enfin, les jugements mixtes.

Cette troisième classification prend en compte les effets de la décision.

A- Jugement contradictoire et jugement par défaut

On peut dire d’une décision qu’elle est contradictoire lorsqu’elle a été rendue à la suite de la confrontation des moyens des deux parties ou en présence des parties concernées. A défaut, la décision est une décision de défaut.

On parle de décision contradictoire, par référence à l’article 144 du code de procédure civile qui indique les différentes hypothèses dans lesquelles la décision peut être considérée comme étant contradictoire :

-La partie a eu connaissance de la procédure du fait de la signification ou de la notification de l’acte introductif d’instance à la personne concernée.

-La partie a comparu en cours d’instance, soit par elle-même, soit par représentant ;

-La partie a fait valoir à un moment de la procédure ses moyens.

Toute partie qui remplie l’une des conditions alternatives ainsi prévue par l’article 144 du code de procédure civile, ne peut être jugée par défaut. Elle est donc jugée contradictoirement.

Toutes ces hypothèses traduisent la présence de la personne ou de la partie et rendent individuellement la décision contradictoire à son endroit.

On peut donc dire que pour qu’une partie soit condamnée par défaut, il ne suffit pas qu’elle ne manifeste pas sa présence physique à l’audience (défaut de comparution) ou qu’elle ne prenne pas de conclusions nonobstant sa présence à l’instance (défaut, faute de conclusions), il faut :

-soit qu’elle n’ai pas eu connaissance officiellement de l’acte introductif d’instance (il s’agit des actes de saisine de juridiction telles que l’assignation, la comparution volontaire, la requête) ;

-soit qu’elle n’ai ni personnellement, ni par représentant comparu à un moment quelconque du procès ;

-soit qu’elle n’ai pas fait valoir des moyens à un moment quelconque du procès.

Dans ces conditions, il est évidemment difficile qu’une personne puisse être jugée par défaut.

A titre de droit comparé, en France, il faut que la voie de l’opposition soit fermée, de sorte que l’on ne puisse jamais bénéficier du défaut et de l’opposition. La voie de recours restant ouverte est l’appel.

En droit ivoirien, notamment en droit du travail, il est possible de faire opposition dans différentes hypothèses où, bien qu’ayant eu connaissance de l’acte introductif d’instance, l’on aura ni comparu, ni déposé des conclusions.

Le principal intérêt de la distinction et de la bonne qualification du jugement contradictoire ou par défaut, est que les jugements rendus par défaut donnent droit a une voie de recours supplémentaire qu’est l’opposition, alors qu’un jugement contradictoire n’est pas susceptible d’opposition.

a- Jugement et ordonnance

Suivant les cas, les décisions du juge sont dénommées ordonnance ou jugement. On parle en générale d’ordonnance, lorsqu’il s’agit de décision du juge de la mise en état, du juge des référés ou lorsque le juge statut sur une requête par voie d’ordonnance. On parlera de jugement ou d’arrêt dans les autres cas.

Dans la forme, les ordonnances surtout celles du juge des référés ou du juge qui statut sur une requête, sont plus ramassés et figurent au bas de la requête.

Du point de vue de leur domaine, les ordonnances n’entament jamais le fond de l’affaire. De même, au niveau de leur source, les ordonnances sont rendues par des juges qui ne sont pas des juges du fond à proprement parlé.

Du point de vue des effets, les ordonnances ont des effets limités. Ce sont des décisions provisoires qui n’ont jamais d’autorité de la chose jugée au principal, quand bien même, elles seront exécutoire sur minute.

Aussi, les ordonnances du juge de la mise en état, ne peuvent pratiquement pas faire l’objet d’une voie de recours.

b - Jugement provisoire, jugement définitif et jugement mixte

On qualifie de jugement définitif, tout jugement qui se prononce sur le fond du litige, c'est-à-dire, sur tous les points de celui-ci ou sur certains points seulement. Jugement de fond et jugement définitif sont synonymes.

En pratique, les justiciables non spécialistes de la procédure, ont tendance à prendre pour jugement définitif, un jugement qui n’est plus susceptible de voie de recours. Mais selon le professeur SOLUS, le jugement définitif, par opposition au jugement avant-dire-droit, est celui qui statut sur le fond.

C’est un tout autre problème de savoir si le jugement, qu’il soit définitif ou avant-dire-droit, n’est plus susceptible de voie de recours, auquel cas, il est correct et seul correct, d’user de l’expression : « jugement passé en force de chose jugée ».

Au contraire des jugements définitifs ou sur le fond, il y a les jugements provisoires. On distingue les jugements provisoires par nature et ceux qui ordonnent des mesures provisoires.

Au nombre des jugements provisoires par nature, on peut citer : les ordonnance du juge des référés, du juge de la mise en état ou des ordonnances rendus sur requête.

Pour ce qui concerne les jugements provisoires ordonnant des mesures provisoires, on trouve dans ces décisions dites : « Avant-dire-droit » qui sont en fait des jugements ou décisions préparatoires. Il s’agit des jugements relatifs à l’instruction ou ordonnant une mesure provisoire telle que l’enquête, l’instruction, etc.

Ce sont les jugements qui tranchent dans leurs dispositifs, une partie du principal et qui ordonnent en même temps une mesure avant-dire-droit.

Exemple : Le juge saisi d’une action en responsabilité, rend un jugement mixte lorsqu’il se prononce ou statut sur le principe de la responsabilité (c’est le principal) et ordonne une mesure d’instruction telle que l’expertise pour déterminer l’étendue de la responsabilité.

B- Régime juridique

En ce qui concerne les recours, le code de procédure civile ivoirien prévoit que les jugements avant- dire-droit, ne peuvent faire l’objet d’un recours qu’avec la décision sur le fond. On peut observer qu’à ce niveau, il y a eu une évolution juridique.

Dans le régime antérieur, il fallait distinguer entre les décisions avant-dire-droit, ayant un caractère interlocutoire et celles qui n’avaient qu’un caractère préparatoire.

Les décisions n’ayant qu’un caractère interlocutoire, pouvaient faire l’objet d’un recours immédiat. En revanche, les décisions n’ayant qu’un caractère préparatoire et qui par conséquent n’anticipant pas sur le fond, ne pouvaient pas faire l’objet d’un recours immédiat.

En effet, le jugement interlocutoire préjuge du fond. La mesure provisoire, anticipait sur la décision du juge, sur le fond. En revanche, le jugement préparatoire ne préjugeait jamais du fond.

Exemple : un jugement ordonnant une enquête pour juger de l’état d’un compte.

En réalité, il est difficile de faire la différence entre ces deux types de jugement avant-dire-droit.

Au contraire des jugements avant-dire-droit, les jugements sur le fond peuvent faire l’objet d’un recours immédiat.

Le code de procédure civile, ne règle pas expressément la question des régimes juridiques des jugements mixtes. Et la jurisprudence est fluctuante en ce qui les concerne.

Après avoir dans un premier temps admis le principe du recours immédiat en ce qui les concerne, la jurisprudence a opéré un revirement pour dire que ces jugements peuvent faire objet de recours qu’avec le jugement sur le fond.

Par ailleurs, seuls les jugements définitifs bénéficient en règle générale de l’autorité de la chose jugée au contraire des jugements avant-dire-droit.

On dit que du fait de l’autorité de la chose jugée dont bénéficient les jugements définitifs, ceux-ci acquièrent force de l’autorité légale et entrainent le dessaisissement du juge au contraire des jugements avant-dire-droit.

Mais on peut noter que cette absence d’autorité ne joue qu’à l’égard du principal. Ce qui implique que le juge qui aura à statuer au fond, ne sera pas lié par ce qui a été décidé avant dire droit. Mais la décision avant dire droit ne perd pas toute autorité, de sorte que le juge qui a statué avant-dire-droit, ne peut avoir à se rétracter que si un fait nouveau surgissait. Cela est très important, car en pratique, des confusions sont faites, qui peuvent indéfiniment entrainer la saisine du juge des référés, notamment lorsque l’on s’appuis sur la formule qui dit que les ordonnances du juge des référés n’ont pas au principale l’autorité de la chose jugée. Il faut considérer que même au provisoire, cette autorité doit bel et bien exister.