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LES CONDITIONS OBJETIVES DE L’ACTION EN JUSTICE

Contrairement aux conditions subjectives, elles existent en dehors des parties. On distingue des conditions citées par le code de procédure civile, à savoir l’intérêt et la qualité à agir et d’autres conditions considérées comme tel en raison de l’effet qu’elles produisent dans la procédure.

I : L’intérêt et la qualité à agir

A- L’intérêt à agir en justice

L’on a coutume de dire : « Pas d’intérêt, pas d’action »

L’article 3 du code de procédure civile, fait de l’intérêt la condition première de toute action. Cette condition permet de refouler toutes les velléités de contestation théorique et académique.

a- La notion d’intérêt

Le principe de la nécessité d’un intérêt étant admis, il n’est pas toujours facile de dire s’il est suffisant pour fonder une action.

Quand l’intérêt a un caractère patrimonial, il est plus facilement admis que quand il revêt un caractère simplement et purement moral. L’intérêt est l’utilité finale qui nécessite l’action.

b- Les caractères de l’intérêt

L’article 3.1° du code de procédure civile, parle de l’intérêt légitime, direct et personnel. Mais cet intérêt doit être aussi né et actuel.

1- Le caractère légitime juridiquement protégé

C’est au regard de ce caractère que par le passé, l’action de la concubine était rejetée. Il implique que l’intérêt n’est pas fortuit et est fondé en droit sur un droit subjectif, de sorte que le concubinage ne résultant pas d’une situation juridique réglementée, ne peut conférer de droit.

La notion d’intérêt a évoluée en droit ivoirien. Les juridictions du fond ont finalement admis l’action des concubins en les qualifiant d’épouses coutumières (RID, 77 n° 3 & 4 page 123). Il y a eu là un revirement jurisprudentiel.

En matière d’accident de la circulation automobile, une loi de 1984 relative à l’indemnisation des victimes d’accident a confirmé la situation des concubines, en matière d’assurance, en les admettant au rang des personnes indemnisables.

Il ne faut non seulement pas perdre de vue que la jurisprudence est créatrice de droit et a un rôle indirect de co-législateur dans le cadre de l’article 4 du code civil, lequel prévoit que : « Le juge qui refusera de juger, sous prétexte du silence, de l’obscurité ou de l’insuffisance de la loi, pourra être poursuivi comme coupable de déni de justice ».

En outre, tout ce qui est juridique comme le dit, le doyen JEAN VINCENT n’est point enchâssé dans le droit subjectif. La répétition de certains faits permet toujours à l’interprète de décider qu’il est né une prérogative précise.

2- L’intérêt doit être direct et personnel

L’action ne peut être exercée que par le titulaire du droit allégué. Une personne ne peut prendre l’initiative d’exercer une action en justice en vue de sauvegarder les intérêts d’autrui ou d’assurer le respect du droit. Ce qu’il ne faut pas confondre avec l’hypothèse de la représentation dans laquelle le représentant n’agit pas pour lui-même.

Peut-on envisager la cession d’une action dans le cadre de la cession de droit litigieux ?

En ce qui concerne l’action des groupements, il y a assurément intérêt direct et personnel, quant il y a en jeu l’intérêt personnel de ceux-ci entant que personnes morales.

Le problème se pose le plus souvent pour l’intérêt, dit indirect du groupement. Le groupement pourra-t-il agir en justice pour l’intérêt moral du groupement qu’il défend ?

La jurisprudence française répond à cette question en fonction de la nature du groupement en cause. Ainsi, il a été jugé que les syndicats professionnels reconnus par une loi de 1884, ne pouvaient pas exercer une action en justice pour des intérêts collectifs. Mais, la jurisprudence a ensuite variée lorsqu’un arrêt des chambres réunies, du 5 avril 1913, a mis un terme à la controverse en reconnaissant aux syndicats professionnels le droit de défendre en justice, les intérêts collectifs. C’est ainsi, qu’une loi de 1920 a confirmé cette position jurisprudentielle.

Il faut cependant que l’intérêt allégué ait un caractère professionnel et soit en rapport avec les objectifs poursuivis par le syndicat.

Les associations, à la différence des syndicats et sauf autorisation légale ne peuvent agir dans la cadre des intérêts collectifs. Même le caractère d’utilité reconnu à certaines d’entre elles ne leur confère pas automatiquement le droit d’agir en justice pour la protection des intérêts collectifs et indirects.

Toutefois, la jurisprudence apporte une atténuation à ce principe en admettant que les associations dites de défense, c'est-à-dire des associations créées spécialement pour exercer sur une forme collective les actions qui appartiennent individuellement à chaque membre de l’association, peuvent agir en justice.

3- L’intérêt doit être né et actuel

Le rôle du juge consiste à trancher des litiges déjà nés, un intérêt futur ou éventuel ne peut pas en principe justifier une action en justice. Mais ce caractère de l’intérêt, s’il permet d’interdire les actions provocatoires ou jactantes ou interrogatoires, n’empêche pas la jurisprudence d’admette quelques fois à côté de la loi ces actions de type préventif. C’est le cas lorsque l’on admet en référé qu’un plaideur puisse demander la prise de mesures conservatoires ou d’instruction en vue de faire établir par voie judiciaire les preuves d’un litige non encore né.

Les exceptions légales à ce caractère né et actuel, tiennent essentiellement à l’action en vérification d’écriture ou l’action en dénonciation de nouvelle œuvre.

B- La qualité pour agir

La qualité qu’exige l’article 3.2° du code de procédure civile, est de manière générale considérée comme le titre qui donne le pouvoir d’exercer en justice, le droit dont la sanction est demandée.

La qualité, dans la majorité des cas, n’est pas considérée comme une condition autonome de l’action dans la mesure où elle se confond avec le caractère personnel et direct de l’intérêt.

La distinction entre la qualité et l’intérêt est parfois difficile à faire, et en générale, quand on a la qualité, on a l’intérêt. Ce n’est que dans le cas des actions dites attitrées que l’on distingue la qualité de l’intérêt.

Dans les actions attitrées, on distingue parmi les personnes intéressées, celles qui peuvent agir. Dans les cas de représentation, la qualité tend à se confondre avec le pouvoir de représentation.

L’intérêt s’apprécie alors en la personne du représenté, tandis que la qualité, est le titre qui octroi le pouvoir d’agir qui s’apprécie en la personne du représentant.

En réalité, il y a deux notions qui se superposent, la qualité pour agir et la qualité de représentation.