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L’ENQUETE DE FLAGRANCE EN DROIT IVOIRIEN

Réflexion proposée par le Pr. BLEA Alban

 

Le code de procédure pénale présente l’enquête de flagrance comme étant l’ensemble des investigations menées par la police judiciaire lorsque des crimes et délits flagrants sont commis. Mais qu’est qu’un crime ou un délit flagrant ?

 

I-                   Notion de crimes ou délits flagrants

 

L’article 77 CPP qui définit les notions de crimes et délits flagrants donne de constater que le CPP a retenu une seule catégorie contre trois anciennement. (Il y avait d’abord les crimes et délits flagrants par nature, ensuite les crimes et délits flagrants par assimilation[1] et enfin les infractions correctionnelles[2] soumises à la procédure de jugement de flagrant délit). Les deux dernières catégories ayant été supprimées, il ne reste que les crimes et délits fragrants par nature.

Ils sont définis à l’article 77 al 1er du CPP en ces termes : « est qualifié crime ou délit flagrant, le crime ou le délit qui se commet actuellement ou qui vient de se commettre. Il y a aussi crime ou délit flagrant lorsque, dans un temps très voisin de l’action, la personne soupçonnée est poursuivie par la clameur publique ou est trouvée en possession d’objets ou présente des traces ou indices, laissant penser qu’elle a participé au crime ou délit ».

On remarque ici qu’il y a là encore trois sortes de crimes ou délits flagrants par nature. On a d’abord le crime ou délit qui se commet actuellement. Ensuite le crime ou délit qui vient de se commettre. Et enfin le crime ou délit pour lequel le suspect est poursuivi par la clameur publique ou est trouvé en possession d’objets ou encore présente des traces ou indices laissant penser qu’il a effectivement participé à l’infraction. A travers ces trois sortes de crimes et délits flagrants par nature on remarque que le crime ou délit flagrant par nature est une infraction qui se caractérise par l’actualité des faits qui la réalise ainsi que par l’apparence des indices et traces de sa réalisation.

 

1. L’actualité des faits constitutifs de l’infraction 

 

Tous les cas de flagrance cités plus haut ont en commun d’imposer un critère temporel. Ils parlent d’infraction qui se commet actuellement ou qui vient de se commettre ou pour laquelle, dans un temps très voisin de l’action le suspect est poursuivi par la clameur publique. 

L’infraction doit donc être actuelle ou récente. Toutefois l’article 77 al 1er ne fixe pas la durée ultime entre le moment de la commission effective du fait et celui où il est constaté.

La doctrine française face à cette imprécision du temps, optait pour une approche restrictive.

Pour elle le temps mis entre la commission de l’infraction et celui du début de l’enquête devait être une question d’heures, voire de minutes pour parler de flagrance. La jurisprudence française pour sa part avait adopté une position plus large en admettant qu’un délai de 28 heures au lieu de 13 heures, répondait aux exigences de l’article 77 du CPP mais pas une durée de six jours. (Cour d’Appel de Douai 8 sept 1960, JCP 1960.I.11777 ; Cassation crim 26 Février 1991, Bull crim n°96 ; cassation crim ,11 Février 1998, Bull crim n° 55)

Cette jurisprudence peut valablement s’appliquer en droit ivoirien dans la mesure ou les dispositions de l’article 77 de notre code pénal sont rédigées dans les mêmes termes que celles du code de procédure pénale français. Par ailleurs ce délai d’appréciation de l’actualité de l’infraction nous parait plus raisonnable.

 

2. L’apparence des traces et indices de l’infraction 

Cette caractéristique de la flagrance correspond à la troisième hypothèse de l’infraction flagrante. Cette théorie de l’apparence a été développée par la jurisprudence pour permettre à l’officier de police judiciaire qui enquête de trouver des éléments objectifs permettant de dire si   l’infraction est récente ou ancienne. 

Ainsi la Chambre criminelle de la Cour de cassation française a estimé dans un arrêt daté du 4 Janvier 1982 que « L’état de flagrance est caractérisé dès lors qu’il résulte des constatations des juges du fond que les officiers de police judiciaire ont relevé des indices apparents d’un comportement délictueux relevant l’existence d’infraction répondant à la définition de l’article 77 ».

 

II-                Les caractéristiques de l’enquête de flagrance

 

L’enquête en matière de crimes et délits flagrants se caractérise par la célérité des opérations d’enquête et l’accroissement et la coercition des pouvoirs de la police judiciaire.

 

A/ La célérité des opérations d’enquête 

Lorsqu’il y a une infraction flagrante la police judiciaire agit avec célérité pour rassembler les preuves de l’infraction et en rechercher les auteurs. Tous les articles du code de procédure pénale relatifs à ce type d’enquête utilisent des mots ou expressions qui traduisent cette célérité dans l’action. Par exemple l’article 78 al 1er du CPP prescrit qu’en cas de crime flagrant l’officier de police judiciaire doit informer immédiatement le Procureur de la République et se transporter sans délai sur le lieu de l’infraction et procède à toute constatation utile. 

L’article 80 indique qu’il doit se transporter sans désemparer au domicile ou il doit procéder à des perquisitions. C’est dire qu’en matière d’enquête de flagrance, la police judiciaire agit dans l’urgence. Cette urgence se justifie par le souci de ne pas laisser disparaitre les preuves de l’infraction (Article 77 al 2 et 3).

 

B / L’accroissement des pouvoirs de la police judiciaire 

Les pouvoirs de la police judiciaire en cas d’enquête de flagrance sont essentiellement exercés par les officiers de police judiciaire. On observe que ces pouvoirs s’accroissent lorsque la police judiciaire procède à une enquête de flagrance.

En effet, ordinairement lorsque la police judiciaire procède à une enquête de police elle dispose du pouvoir de procéder à des auditions, de procéder à des perquisitions, des saisies etc. Mais lorsqu’elle agit en matière de crimes ou délits flagrant ces pouvoirs deviennent plus nombreux et plus coercitifs. Il s’agit notamment :

•              Du pouvoir d’aviser immédiatement le Procureur de la République du crime ou délit qui vient de se commettre. (article 78 du CPP) ; ce pouvoir n’est pas à confondre avec l’obligation qui pèse sur les officiers de police judiciaire d’informer le Procureur de la

République des crimes, délits et contraventions dont ils ont connaissance (article 31 du CPP)  Du pouvoir de se transporter sans délai sur les lieux de l’infraction et d’y procéder à des constatations utiles ;

•              Le pouvoir de veiller à la conservation des indices susceptibles de disparaitre et de tout ce qui peut servir à la manifestation de la vérité (article 78) ;

•              Du pouvoir de saisir les armes et instruments qui ont servi à commettre l’infraction ainsi que tout ce qui parait avoir été le produit de l’infraction ;

•              Du pouvoir de prendre connaissance des pièces et documents découverts au cours de la perquisition avant de procéder à leur saisie (article 78 al 2) ;

•              Du pouvoir de défendre à toute personne de s’éloigner du lieu de l’infraction (article 81 al 1er) ;

•              Du pouvoir de procéder à des contrôles et vérifications d’identité (art 81 al 2) ;

Comme on peut l’observer, il y a un accroissement des pouvoirs de la police judiciaire lorsqu’il y a une infraction flagrante. Cet accroissement se justifie également par la nécessité d’agir vite pour ne pas que disparaissent les preuves de l’infraction qui sont déjà apparentes. 

 

C/ Le caractère coercitif des pouvoirs de la police judiciaire

L’enquête de flagrance est assez contraignante pour les citoyens car le code de procédure pénale reconnait au cours de celle-ci des pouvoirs coercitifs à la police judiciaire.

En effet les citoyens sont tenus de collaborer à l’enquête de flagrance. Selon l’alinéa 2 de l’article 81, « Toute personne dont il apparaît nécessaire, au cours de l’enquête de flagrance, d’établir ou de vérifier l’identité doit, à la demande de l’OPJ, se prêter aux opérations qu’exige cette mesure ». Tout contrevenant est passible d’une amende de 50.000 à 500.000 francs.

L’officier de police judiciaire présent sur les lieux d’une infraction flagrante peut interdire à toute personne de s’en éloigner. (Article 81 du CPP).


[1] L’article 53 al 2 disposait  que « est assimilé au crime ou délit flagrant  tout crime ou délit qui même non commis dans les circonstances  prévues à l’alinéa 1er  a été commis  dans une maison dont le chef requiert  le Procureur de la République ou un officier de police judiciaire de le constater ».

[2] L’alinéa 3 du même article 53 précité disposait :  «  est également soumise à la procédure de flagrant délit  toute infraction correctionnelle, passible d’une peine d’emprisonnement qui, à la suite d’un enquête officieuse  , ne parait pas devoir faire l’objet d’une instruction préalable, en raison soit des aveux de l’inculpé , soit de l’existence de charges suffisantes. »



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